Vue de haut d'une machine à écrire ancienne sur une table de bois.

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Appels

Appel à communication pour les journées d’étude « Œuvres variables : Ce qui reste au musée quand tout change »

Paris

    Appel à communication pour la journée d’étude « Œuvres variables : Ce qui reste au musée quand tout change »

    Les propositions doivent être transmise avant le 9 février 2026, à ciecouqo@uqo.ca.

    Organisatrices : Mélanie Boucher, Cécile Camart
    Comité scientifique : Julie Bawin, Mélanie Boucher, Cécile Camart
    Lieu : Université Sorbonne Nouvelle
    Date : 5 et 6 juin 2026

    L’axe 3 (La collection élargie) de la recherche du Partenariat Des nouveaux usages des collections dans les musées d’art du Groupe de recherche et de réflexion CIÉCO organise deux journées d’étude à l’Université Sorbonne Nouvelle. Ces journées de conférences, d’échanges et de discussions intégrées à la programmation scientifique de l’axe sont réalisées en partenariat avec l’Université du Québec en Outaouais et en collaboration avec l’Équipe Art et musée. Elles convoquent les chercheur·euses, artistes et professionnel·les des musées à soumettre une proposition de contribution sur l’œuvre variable et son collectionnement en musées.

    Depuis les années 1970, la production artistique contemporaine a mis en crise l’idée d’une œuvre stable, définie une fois pour toutes dans sa matérialité, sa forme ou son dispositif. Les pratiques conceptuelles, performatives, processuelles, mais aussi vidéographiques, installatives et numériques (ou médiatiques) ont introduit dans les musées et les collections une catégorie problématique qui demeure encore de nos jours à définir : l’« œuvre variable ». L’existence et la présentation de ces œuvres insaisissables ne reposent pas sur une fixité matérielle, mais bien sur un ensemble de conditions à respecter, de protocoles à suivre ou de certifications auxquelles les démarches conceptuelles de Joseph Kosuth, Sol Lewitt ou Lawrence Weiner nous ont familiarisées. Leurs œuvres « à réaliser » ou « à activer » selon les instructions ont déplacé l’autorité de l’objet vers le respect de l’idée et la validité du document. La première occurrence recensée du terme « variable » employé pour conceptualiser l’art contemporain date de 1979. L’exposition Dimensions Variable présentée au New Museum de New York la même année était consacrée à un enjeu d’actualité pour la communauté artistique.

    Deux décennies plus tard, en 2003, le Réseau des médias variables fondé par le Solomon R. Gugghenheim de New York et la Fondation Daniel Langlois de Montréal réunissait une vingtaine d’institutions nord-américaines autour d’une variabilité qui ne se limitait plus aux changements de dimensions, s’ouvrant aux modifications matérielles induites par la technologie. Le Réseau cherchait à fournir « un processus et des solutions pour aborder des œuvres d’art créées à partir de divers médias et matériaux, ainsi que pour déterminer des protocoles et des initiatives autorisant la souplesse au chapitre de la préservation d’un éventail de pratiques de création » (Depocas, p. 7). Afin de contrer l’obsolescence d’installations et d’œuvres multimédia comme celles de Nam June Paik ou Bruce Nauman, la contribution du Réseau a ouvert une autre question, celle du maintien de l’authenticité. Avec les années 1980-1990, l’essor de l’installation et de la vidéo sont venus démultiplier les cas d’« œuvres variables » entrés dans les collections muséales. C’est alors que le musée et la muséologie ont été confrontés à cette impermanence de l’œuvre. Que doit-on préserver d’une œuvre conçue pour être actualisée différemment selon les contextes ? Comment la documenter, dans le respect des versions successives, des réinstallations divergentes, ou des adaptations techniques qui jalonnent son parcours ? L’évolution possible des œuvres conservées au musée s’est fait l’écho de questionnements curatoriaux. Le collectionnement de l’art contemporain est venu non seulement interroger la dimension expographique déterminant les œuvres, mais également la dématérialisation des espaces de l’exposition favorisée avec les œuvres nativement numériques. La performance est venue pour sa part étendre les considérations spatiales aux temporelles, convoquant les domaines de la danse et du théâtre.

    La variabilité invite à revoir les attendus de l’unicité, de la matérialité et de la stabilité au profit de la temporalité et de la multiplicité intégrée au concept. Elle est aujourd’hui amenée à qualifier des œuvres qui se déclinent en divers états successifs ou concourants, évoluant selon la volonté des artistes, les expositions et autres activités de mise à vue de même qu’en fonction des décisions institutionnelles qui viennent cadrer l’étendue de la variabilité. Le changement dans l’œuvre rencontre ainsi à notre époque la mutation des pratiques muséales. Ce qui était d’abord pensé en tant que stratégie de détournement artistique est devenu un défi institutionnel, théorique et patrimonial. Les pratiques de documentation et de conservation et les musées eux-mêmes en sont venus à intégrer cette variabilité comme un paramètre structurel. Des programmes comme Inside Installations (2004-2007, soutenu par l’UE) et Reshaping the Collectible: When Artworks Live in the Museum (2018-2021, Tate Modern) en rendent compte.

    Ces journées ont pour principal objectif d’étudier l’impact de la variabilité sur le statut des œuvres collectionnées, les besoins nouveaux auxquels le musée doit répondre de même que le renouvellement des pratiques, discours et valeurs associés aux processus d’acquisition, de documentation et de mise à vue. Les contributions qui privilégient des analyses transversales seront les bienvenues, dans le but d’élargir l’état actuel des connaissances, qui sont principalement fondées sur une approche monographique (par artiste) ou disciplinaire (conceptuelle, installative, performative). Il s’agit donc de préciser quel est l’impact de la muséalisation de la variabilité sur l'œuvre, le musée et le milieu de l’art contemporain.

    Trois axes de réflexion sont plus particulièrement considérés

    1. Histoires et théories de la variabilité

    Les récits de la variabilité muséale et les questions terminologiques associées; la relation entre la variabilité muséalisée, qui est nouvelle, et les changements apportés par l’artiste à son œuvre, de tout temps existants; l’instabilité ontologique.

    2. Pratiques artistiques et autorité déléguée

    Les récits autorisés; l’acceptabilité statutaire d’œuvres pour lesquelles l’authenticité n’est plus rattachée à la matérialité; la reconnaissance élargie de la métamorphose; l’agentivité tierce sur le devenir des œuvres; dans les discours autorisés; à travers la critique d’art.

    3. Critiques muséales et pratiques de soin

    La diversité et la contestation des modèles muséaux; les valeurs de marché, patrimoniale et communautaire; les nouvelles pratiques documentaires et d’archivage; les soins prodigués et modèles différenciés.

    Pour soumettre votre proposition

    Les chercheur·euses, artistes et professionnel·les des musées sont invité·es à soumettre une proposition (250-500 mots), une biographie (200 mots), une bibliographie (5 à 10 sources) ainsi qu’à spécifier la durée souhaitée de la communication (une durée maximale de 20 minutes, excluant la période d’échange et de questions).

    Les propositions doivent être transmise avant le 9 février 2026, à ciecouqo@uqo.ca.

    Toute question peut également être adressée à cette adresse, à Louis-Pierre Marien-Trottier, coordinateur de CIÉCO-UQO.

    Repères bibliographiques

    • Auslander, P. « On the Performativity of Performance Documentation », in C. Clausen (ed.), After the Act: The Re(Presentation) of Performance Art, Vienne, Museum Moderner Kunst Stiftung Ludwig, 2007, p. 21-33.
    • Acocella, A., Bawin, J., et M. E. Minuto (ed.), Arabeschi Rivista di studi su letteratura e visualità, no 24, janvier-juin 2025.
    • Bénichou, A., Ouvrir le document. Enjeux et pratiques de la documentation dans les arts visuels contemporains, Dijon, Les Presses du Réel, 2010.
    • Boucher, M., Fraser, M., et J. Lamoureux (ed.), Réinventer la collection : l’art et le musée au temps de l’évènementiel, Montréal, Presses de l’Université du Québec à Montréal, 2023.
    • Buignet, C., Favier, A., et C. Nosella (ed.), Variabilité, mutation, instabilité des créations contemporaines, Aix-en-Provence, Presses universitaires de Provence, 2021.
    • Cometti, J.-P., Conserver/Restaurer. L’œuvre d’art à l'époque de sa préservation technique, Paris, Gallimard, NRF Essais, 2016.
    • Cone, L.N., « The Variable and Changing Status of Performance Art Relics and Artifacts in Museum Collections », Verband der Restauratoren, vol. 2, 2017, p. 106-112.
    • Couture, F. (ed.), Variation et pérennité des œuvres contemporaines ?, Québec, Éditions MultiMondes, 2013.
    • Dominguez Rubio, F. Still Life: Ecologies of the Modern Imagination at the Art Museum, Chicago, The University of Chicago Press, 2020.
    • Depocas, A., Ippolito, J., et C. Jones (ed.), Permanence Through Change: The Variable Media Approach/L’approche des médias variables : la permanence par le changement, New York et Montréal, Guggenheim Museum Publications et The Daniel Langlois Foundation for Art, Science and Technology, 2003.
    • Hummelen, I., et D. Sillé (ed.), Modern Art: Who Cares?, London, Archetype Publications, 1999.
    • Giannachi, G., et J. Westerman (ed.), Histories of Performance Documentation: Museum, Artistic, and Scholarly Practices, London et New York, Routledge, 2018.
    • Giguère, A., « Art contemporain et documentation : la muséalisation d’un corpus de pièces éphémères de type performance ». Thèse de doctorat en muséologie, médiation, patrimoine, Montréal, Université du Québec à Montréal, et Avignon, Université d’Avignon et des Pays de Vaucluse, 2012.
    • Hölling, H.B., Feldman, J.P., et E. Magnin (ed.), Performance: The Ethics and the Politics of Conservation and Care, volumes 1-2, London et New York, Routledge, 2023-2024.
    • Laurenson, P., « Authenticity, Change and Loss in the Conservation of Time-Based Media Installations », Tate Papers, automne 2006.
    • Scholte, T., et G. Wharton (ed.), Inside Installations: Theory and Practice in the Care of Complex Artworks, Amsterdam, Amsterdam University Press, 2011.
    • Vaknin, J., Stuckey, K., et V. Lane, All this Stuff: Archiving the Artist, Oxfordshire, Libri Publishing 2013.
    • Van Saaze, V., Installation Art and the Museum Presentation: Presentation and Conservation of Changing Artworks, Amsterdam, Amsterdam University Press, 2013.

    Partenaires

    Membres

    Mélanie Boucher
    Visage d'une femme souriante au cheveux mi-longs brun foncés.

    Mélanie Boucher

    Professeure à l’École des arts et cultures, Université du Québec en Outaouais

    Cécile Camart
    Portrait d'une femme souriante aux cheveux blonds ondulés.

    Cécile Camart

    Maîtresse de conférences en histoire de l’art contemporain et muséologie, Université Sorbonne Nouvelle

    Julie Bawin
    Portrait d'une femme aux cheveux longs et bruns.

    Julie Bawin

    Professeure, Université de Liège

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