Autres

Fondements, pratiques et objectifs du commissariat participatif en musées d'art : du Brooklyn Museum au Musée des beaux-arts de Rouen

Mémoire de maîtrise

Gatineau

    Après avoir connu l’âge d’or des grandes expositions temporaires dans les années 1990, les musées font l’expérience d’un certain « retour aux collections » depuis le tournant du millénaire. Ils prennent intérêt à valoriser leurs collections et à dynamiser leur présentation en réinvestissant certains principes des productions temporaires. L’invitation d’intervenants externes à réinterpréter les collections compte parmi ces nouvelles stratégies d’exposition. Le musée collabore non seulement avec des artistes, mais aussi d’autres individus sans formation en histoire de l’art ou en muséologie. Cette recherche considère spécifiquement l’invitation faite au public à s’investir dans le développement d’expositions. Plus particulièrement, il est question de commissariat participatif dans les musées d’art avec les usagers, soit les visiteurs des installations physiques (intra muros) et les utilisateurs des services hors les murs ou en ligne (extra muros). Le commissariat participatif consiste en un projet d’exposition co-développé par le musée et ses usagers dans une approche de collaboration et de co-création. À titre de co-commissaires, les deux parties se répartissent la tâche commissariale dans des proportions diverses selon le cadre établi.

    Dans un premier temps, cette recherche montre que le commissariat participatif prend racine dans certaines pratiques muséales artistiques et commissariales orientées vers la participation. Il tire origine notamment dans la nouvelle muséologie, et puise dans les muséologies dites « actives » telle que la muséologie sociale, participative ou citoyenne. L’art participatif est également un facteur d’influence par la transition qu’il a initiée quant au statut du regardeur qui passe de récepteur passif à co-producteur. Enfin, l’autonomisation et l’externalisation de la fonction commissariale annoncent aussi le commissariat participatif de même que les invitations muséales lancées à des artistes, des spécialistes d’autres domaines et des vedettes pour la conception d’expositions. Cette recherche illustre l’invitation d’artistes, de vedettes, puis du public à endosser le rôle de commissaire par l’étude d’un cas central : le projet d’exposition La Chambre des visiteurs dans le cadre du programme Le Temps des collections au Musée des beaux-arts de Rouen. Cet exercice montre que les invités – artistes, vedettes, public – adoptent des méthodes différant de celles privilégiées par les conservateurs (l’anachronisme, par exemple) pour interpréter les collections et contribuent au « capital de visibilité » des musées.

    Dans un second temps, cette recherche confirme l’hypothèse selon laquelle le commissariat participatif permet au musée de mettre en valeur ses propres collections, en atteignant à la fois un objectif marketing par le « faire évènement » et en remplissant sa mission socio-éducative par l’interaction des usagers avec les oeuvres, la plupart du temps issues des collections muséales. D’une part, l’étude du cas précis de Rouen jumelé à plus d’une trentaine d’autres cas permet d’affirmer que les musées utilisent généralement le commissariat participatif pour mettre en valeur leurs collections. D’autre part, une typologie des objectifs institutionnels donne un aperçu des fonctions que les musées cherchent à remplir grâce aux projets de commissariat participatif. Les musées qui en font usage cherchent, en grande majorité, à : 1) concrétiser une appropriation de l’institution ; 2) assurer l’accès à leurs coulisses ; 3) développer de nouveaux publics ; 4) mieux comprendre les publics ; ou 5) souligner un évènement marquant. Alors que les premiers objectifs relèvent davantage de la fonction socio-éducative du musée, les derniers répondent plutôt à cet objectif marketing.

    Réalisations